Pour une fois, nous avons décidé de parler de la navigation avant de l'avoir réalisée et de vous faire un débrief une fois arrivés.
Aurons nous pris les bonnes options ?
Y a t'il un gap entre la littérature et le réel ?
Cette région est-elle si spéciale qu'on le dit ?
Ces miles mythiques à venir revêtent une certaine importance à nos yeux.
Tout d'abord géographiquement.
27 mois que nous voguons d'îles en îles. Depuis juin 2014 et notre départ de Rabat, nous n'avons plus touché de côtes continentales. C'est d'autant plus crucial que ce sera une première sur le continent sudaméricain.
Paradoxalement, pendant nos années terriennes de voyageurs by plane, nous avons délaissé la partie sud de ce continent. Étrange...
La culture, l'histoire, la langue, la gastronomie nous attirent pourtant.
C'est donc avec Ti'Amaraa que nous allons inaugurer ''la zone'' en faisant escales en côtes colombiennes.
D'un point de vue nautique, il s'agit aussi d'un point angulaire de la route des alizés.
Certains appellent même le coin : Le Cap Horn de la Caraïbe.
Engageant comme sobriquet, vous ne trouvez pas ?
En pratique, beaucoup de bateaux sont passés avant nous sans encombre, et même dans l'autre sens.
Bien qu'étant dans le sens du vent et normalement de la mer, d'après nos lectures, il y aurait des règles à respecter. Faute de quoi, le mauvais quart d'heure est assuré.
Nous avons donc dessiné notre cyber-chemin et défini les heures de départ pour être aux meilleurs moments de la journée dans les fameux recoins tordus.
À présent que la saison des orages se calme sur la Colombie, nous commençons à regarder sérieusement les prévisions météo en quête de la bonne période.
Idéalement, il nous faut du vent, sans trop, peu de houle résiduelle en mer des Caraïbes et une période assez sèche. La pluie peut compliquer la fin de la route.
Notre route se décompose en 3 étapes:
1- Le Cabo de Vela :
Après la Punta Gallinas, le point le plus septentrional d'Amérique du Sud, se présentera à nous ce fameux Cap tant craint.
C'est ici qu'en 1499, Alfonso de Ojeda, compagnon de Christophe Colomb, accompagné du cartographe espagnol Juan de la Costa, du navigateur florentin Amérigo Vespucci et de Alberto Da Silva en cuisine (non, on déconne...:-)))) , foula pour la première fois le sol des Amériques.
Comme nous !!! Si Alfonso et ses potes l'ont fait...alors, on devrait y arriver.
Le Cap de la voile en traduction littérale, il ne peut être que fait pour nous et notre catamaran.
Juste pour l'histoire: ce serait grâce au prénom de baptême du comparse italien l'on aurait choisi le nom du continent.
On vous voit relire plus haut pour le chercher ;-)
Et oui, Amérigo.
Allez, fin de la parenthèse Histoire/Géo.
Pour affronter ses courants et sa houle, il y aurait deux règles. Les guides anglophones recommanderaient de passer au plus près des côtes pour avoir le moins d'effets contraires. En revanche, en version française, il est plutôt question de contourner vers le nord puis de passer le cap au large par le nord-ouest.
Qui suivre ?
On va se le jouer à la rugbymen toulousains, on fonce tête la première dans la mêlée.
Nous ferons donc une route directe de Curaçao. Environ 200 nm nous attendent pour cette première étape. En partant au petit matin de Westpunt, nous pointerons nos coques aux portes du Cabo de Vela le lendemain matin. Il nous semble plus sage de négocier cette partie de jour et aussi d'avoir toute la journée devant nous pour pouvoir adapter notre route si nécessaire.
Le mouillage est possible à l'abri du Cap. Nous passerons donc notre première nuit sudaméricaine près des plages du petit village, éponyme du cap, de 1500 habitants réputé pour être le plus populaire de la région Guajira.
Aurons nous envie de descendre à terre après 36 heures de navigation ?
2- Vers Santa Marta:
La région est reconnue pour son vent rafaleux pouvant être particulièrement fort. En effet, nous serons dans l'unique coin de la Caraïbe où l'on peut naviguer sous 30 degrés celsius en admirant les sommets recouverts de neiges éternelles de la Sierra Nevada, la plus haute région montagneuse de la Colombie. Les pics Simon Bolivar et Christophe Colomb, tout proche, culminent à plus de 5 800 mètres.
Waouuuuu la neige !!!
Depuis combien de temps ne l'avons nous pas vue ?
Le panorama doit être saisissant vu d'en bas.
On comprend bien l'effet que la combinaison altitude/froid/côtes/eau chaude peut provoquer sur les conditions de navigation.
Quel sera notre ressenti au réel ?
L' émerveillement l'emportera t'il sur l'adrénaline ?
Nous pensons faire des pauses dans les mouillages protégés des célèbres cinq baies du Parc National Tayrona, du nom de cette civilisation parmi les plus avancée de la préhistoire amérindienne installée dans cette région.
L' arrêt vaut le détour, paraît-il. Il est donné pour être le plus bel endroit de la côte atlantique. En plongeant dans l'océan, la Sierra Nevada a formé des sortes de longues criques au relief accidenté et aux particularités écologiques singulières, baignées de courants marins glacials.
Pour les ploufs, on verra... Enfin, pour la Cap', c'est tout vu.
Quant à Santa Marta, le vent y serait rafaleux, le mouillage restreint et la marina chère.
La ville est toutefois belle et accueillante.
Soit nous trouverons un trou de souris pour planter notre ancre le temps de se reposer un peu,
Soit nous tracerons vers le port suivant Puerto Velero où une place et nos interlocuteurs pour les formalités nous attendent.
On découvrira Santa Marta par la route plus tard. Il est certes possible de faire ses clearances ici. Cependant, si l'on est au mouillage il faut mandater un agent, qui facturerait sa prestation plus de 100€ tout de même. Les marinas ont les autorisations pour jouer le rôle d'agents et la facture serait moins salée. Nous avons prévu de gérer l'ensemble à notre arrivée à Puerto Velero.
3- Barranquilla :
Avant d'arriver au port, une dernière épreuve nous attend. À Bocas de Ceniza se jette dans la mer le plus long fleuve de Colombie, le Rio Grande de la Magdalena.
1 558 km parcourus tout de même !
Certaines tribus indiennes l'appellent Guacacallo: la Rivière des tombes.
Gloupsss...
Elle est toutefois surnommée ''la ligne de vie de la Colombie '' du fait de son parcours à travers le pays créant une voie de transport maritime unique à l'époque. Sa vallée est le siège d'une forte activité économique aujourd'hui.
On préfère ce surnom. Allez savoir pourquoi.
Surtout si des pluies ont eu lieu dans les terres, le débit déjà fort engendre à l'embouchure des conditions rock'n roll.
Si ce n'était que les remous, on pourrait presque trouver cela anodin compte tenu de la largeur à traverser. Le danger est ailleurs. Il est dans les troncs d'arbres et autres résidus que Miss Magdalena charrie jusqu'à la mer. Une fois de plus d'après nos lectures, on navigue sur une eau turbide aux teintes boueuses. D'où l'importance de passer l'embouchure de jour et de redoubler de vigilance pour éviter d'endommager un safran ou une hélice.
La généreuse Magdalena dépose aussi plus deux millions de m3 de sédiments par an dans son estuaire. Autant dire que le chemin est mal pavé. Les bancs de sable ne sont bien sûr pas cartographiés.
Ce serait trop simple.
Barranquilla est un important port industriel. Nous allons donc aussi croisé un fort trafic entrant/sortant.
Ce sera tout ?
Nous avons donc opté, comme beaucoup pour un départ de l'escale précédente de nuit afin d'arriver aux aurores dans la gueule de la louve. À priori Magda, la sauvageonne, ne serait pas du matin. Et nous, nous aurons plus qu'à ouvrir grand les yeux et zigzaguer parmi tous ces éléments.
Chemin faisant, Ti'Amaraa et son équipage arriveront ainsi dans leur marina pour plusieurs semaines de repos bien mérité. Notre dernière halte à quai date de janvier dernier à Pointe à Pitre.
Neuf mois de mouillages, neuf mois de sel, sable et poussières accumulés sur notre cata malgré notre entretien régulier.
Ti'Amaraa, tiens toi près pour une bonne douche.
Mr Karcher est demandé sur le pont.
Vous savez, à présent, où nous trouver dans quelques jours.
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