Notre catamaran nous a conduit en Colombie !!
Nous avons presque du mal à réaliser où nous sommes. Les panoramas côtiers continentaux n'ont plus rien à voir avec ceux des îles. Tout est nouveau. Nous avons le sentiment de commencer un nouveau chapitre.
Nous ressentons une immense joie d'être à nouveau ''en route'' vers de nouvelles découvertes doublée d'une certaine émotion. Le sens de notre Ti'Amaraa (Liberté en polynésien) prend toute sa valeur en faisant escale en ce moment même dans ce pays.
Un peuple torturé par des années de guerre, de sang et de larmes est aujourd'hui aux portes de la liberté et de la paix reconnues à l'international. Nous sommes heureux de vivre ce moment d'histoire de l'intérieur, et nous avons hâte de prendre ''la température'' lors de nos échanges à terre.
Mais en attendant, revenons sur la navigation. Dans l'article ''Demandez le programme '', nous avions tracé les grandes lignes.
Alors, qu'est-ce qui a fonctionné ?
Qu'avons nous vécu de différent entre les nombreuses théories et notre pratique ?
La vidéo vous a déjà donné un petit aperçu.
Voici donc le récit du premier épisode
De Spanish Water, Curaçao au Cabo de la Vela, Colombie
La programmation du jour de départ de notre mouillage de Spanish Water s'est faite en tenant compte de plusieurs paramètres :
En premier lieu, nous avons repéré quel jour la météo était la plus favorable pour passer les fameux Caps difficiles ?
Une fois cette donnée validée, il ne suffisait plus qu'à remonter le temps en fonction des miles à parcourir pour définir le jour du départ.
La seconde composante non principale mais toujours importante à nos yeux: Respecter la tradition de ne jamais partir pour une traversée un vendredi. Nous savons bien qu'être superstitieux porte malheur ;-)
Alors, dans le doute, on s'abstient....
Cela tombe bien. C'est le lundi que la météo est la plus calme pour passer la Punta Gallinas et le Cabo de la Vela. Nous quitterons donc Spanish samedi pour aller mouiller plus nord. Les prévisions météo font état de périodes de calme à 5/10 nds sur notre route. On s'en moque. Pour le coup, on décide de la jouer petits bras dans ces contrées capricieuses. Seuls les prévisions de pluie ne nous enchantent guère mais la fenêtre météo parfaite n'existe pas. Nous misons sur le fait qu'au réel nous aurons plus de vent et peut-être moins de pluie... Et si malheureusement les valeurs s'avéraient exactes, nous jouerions des moteurs. Une fois n'est pas coutume.
Prudence et tranquilité avant les performances sont les maîtres mots pour l'équipage. Qu'importe notre moyenne sur cette nav', l'un comme l'autre nous avons envie d'un moment ''à la cool''.
D'ailleurs pour commencer au chapitre tranquilité, nous n'avons pas mouillé comme prévu à Westpunt. De notre tour en voiture, nous avions gardé le souvenir d'une jolie plage assez fréquentée. Or, lors de la remontée de la côte sous le vent de Curaçao sous GV et Code Zéro, nous avons découvert une multitude de petites baies toutes plus désertes et belles les unes que les autres. Nous avons donc arrêté notre choix sur la Playa Abou, 4 nm au sud de Westpunt.
Quatre mètres d'eau bleue translucide surplombant un fond de sable ont été le refuge de notre ancre pour la nuit. Seuls au monde, nous avons pu profiter une dernière fois du Curaçao Nature que l'on aime loin des complexes hôteliers. À peine le masque à l'eau, nous sommes accueillis par une tortue, une murène et leurs innombrables amis coralliens colorés.
Une pause sereine devant une plage que l'on pourrait croire privatisée avant nos 36 heures de navigation. Pas mal pour commencer.
5h du mat' le réveil sonne. Yalla !!!
Nous vivrons alors 180 nm de pur plaisir. Le vent, la houle et les courants sont conformes dans l'ensemble aux fichiers téléchargés à l'exception des grands mous qui s'avèrent être finalement que très épisodiques. Bonne nouvelle !!!
Nous mettrons à peine 33 heures pour rallier le mouillage du Cabo de la Vela.
Une fois arrivés au niveau d'Aruba et pendant des miles et des miles, il faut naviguer avec la composante de l'industrie pétrolière. L'activité est forte près du lac de Maracaibo. On croisera de nombreux tankers et des bateaux de forage. Beaucoup d'entre eux sont à l'ancre arrêtés en pleine mer car il y a peu de fond dans cette zone.
De nuit, le jeu se complique. Certains n'ont pas leurs AIS allumés et ils sont éclairés comme des sapins de Noël. Difficile d'apprécier s'ils sont arrêtés ou en route. Certains en plein sur notre route sous voile nous poserons un cas de conscience jusqu'au dernier moment.
Ce qui nous aura le plus étonné aura été de naviguer des heures et des heures à distance raisonnable de ces Caps dans à peine 20 mètres d'eau couleur émeraude, à croire que les célèbres pierres précieuses nationales puisent leurs coloris profonds par ici.
On comprend à présent mieux le surnom de Cap Horn de la Caraïbe. La carte est truffée d'épaves. Certaines ont même leurs structures hors de l'eau. Cela donne une ambiance un peu glauque.
Alors qu'il y a ce matin là moins de 10 nds de vent et moins d'un mètre de houle au large, nous rencontrons sur ce plateau des vagues hachées et plus fortes. Cela reste très raisonnable mais on n'ose imaginer quand les cieux sont moins cléments. Il paraît évident que le choix du jour de passage n'est pas à négliger.
Une fois de plus, nous nous régalerons avec notre Imperator Parasailor. Toute la route sera entre 150 et 180 degrés du vent. L'idéal !! Nous ferons in fine malgré les gribs pessimistes près de 80% de cette première phase de route sous voiles.
Quant à la pluie, nous y échapperons. Pas une seule goutte. Toute la nuit nous verrons les éclairs au loin sur les terres. À notre arrivée au Cabo de la Vela, le ciel se fait gris, le tonnerre gronde. On remise vite le Parasailor pour passer sous génois au cas où... mais l'orage passera.
Tout la garde-robe aura été sortie |
Nous mouillerons dans la zone réservée devant le petit village. Nous serons le seul bateau. Tout semble paisible à terre. En fin d'après-midi quelques barques de pêcheurs et des petites familles sur leurs canots viendront nous saluer et faire le tour de Ti'Amaraa. Les sourires sont éclatants sur leurs visages typés indiens sudaméricains, issus de leur descendance avec le peuple Wayuu originaire de cette région.
Nous avons la confirmation, s'il venait à nous la manquer, que nous avons bien changé de planète. À commencer par l'heure, UTC -5. Une heure en moins, la nav' dans les pattes, la nuit précédente à jouer avec les tankers et l'appel des bras de Morphée ne nous laisseront pas la force de descendre à terre bien que l'accueil soit encourageant.
Première étape validée avec le sentiment qu'il faut démystifier cette première partie. Ces Caps ne sont pas si terribles. Il faut juste prendre le temps et choisir, encore une fois, le bon moment.
Une nuit paisible nous attend dans ce vaste mouillage désert.
Demain la route reprend.
À bientôt pour la suite...
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